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Strasbourg

Marc Philibert quitte l’ARES, une page se tourne à l’Esplanade

Directeur de l’ARES depuis le 1er septembre 2000, Marc Philibert fait valoir ses droits à la retraite. Il quitte le centre socioculturel de l’Esplanade ce mercredi 30 juin, cédant sa place à Fabien Urbes. Retour sur un parcours plein de passions et un peu plus de 20 ans de direction.


Dernière journée de travail à l’ARES pour Marc Philibert, qui fait valoir ses droits à la retraite après 21 ans de direction.  Photo DNA /Franck KOBI

De son bureau à l’étage, il a une vue imprenable sur le quartier, à travers une large fenêtre où les tours de l’Esplanade s’incrustent comme dans un tableau. En ce jeudi de juin caniculaire, tout est calme à l’ARES. Dans la cour, Fabien Urbes, qui dirigera la structure à compter du 1er juillet, discute au soleil avec l’équipe. Marc Philibert, lui, s’apprête à résumer en une heure une carrière polymorphe et 21 années de direction.

L’ARES, c’est son biotope depuis le 1er septembre 2000, date de sa prise de poste. Originaire de Montceau-les-Mines, ce « fils de communistes » biberonné à l’éducation populaire a toujours baigné dans l’animation, « depuis [mon] premier job d’été en centre aéré, à 16 ans ». Formé chez les Francas – qui s’appelaient encore Mouvement des francs et franches camarades —, il passe son diplôme d’animateur dans les années 1980 et travaille un temps à Oyonnax, dans l’Ain.

Dix ans consacrés aux radios libres

Puis il se prend de passion pour les radios libres et leur consacre dix ans. D’abord pour de l’animation de quartier ; puis à Mâcon, « pour un projet plus ambitieux, une vraie radio associative professionnelle, Fusion FM , où tout était à créer » et dont il prend la direction. C’est aussi par la radio qu’il arrive en Alsace, chez Dreyeckland , au début des années 1990. Mais lorsque la station « change de modèle », Marc Philibert revient à ses premières amours et toque à la porte du CSC Le Galet, à Hautepierre.

Quand il apprend que l’ARES cherche un directeur – le troisième seulement depuis la création de la structure, en 1964, par une poignée d’habitants de l’Esplanade rassemblés autour de Jean-Marie Lorentz —, il tente sa chance. Avec Claude Gassmann, le nouveau président, le courant passe. « La force de l’ARES, c’est son ancrage, le fait d’être issu d’une association de résidents », estime-t-il. Aujourd’hui, l’ARES, c’est « plus d’une cinquantaine de fiches de paye, 150 bénévoles actifs, un CA qui se réunit une fois par mois et un bureau qui se voit tous les dix à quinze jours » ; mais aussi 2 500 inscrits, issus de 1 500 familles…

Il est loin, le temps du bâtiment en kit monté par les habitants avec le premier directeur, Paul Halat. Si Geneviève Ducros, qui lui a succédé, « a fait rentrer l’ARES dans les dispositifs publics de financement et a consolidé la structure », Marc Philibert y a développé l’offre d’activités, notamment en matière de pratiques artistiques (une autre de ses passions). Il revendique aussi, même si ça ne plaît pas toujours, d’en avoir fait « une marque », « fidèle aux valeurs de l’économie sociale et solidaire, ouverte à tous », et d’y avoir mis en place la tarification solidaire. « Pour assurer une vraie mixité », mais aussi pour ne plus dépendre des seuls financements publics. Dans la même optique, l’ARES met régulièrement ses locaux à disposition d’associations ou de structures de formation. Aujourd’hui, ce sont ici les usagers les premiers financeurs.

Réussites et grains de sable…

Le directeur au long cours a suivi la construction du nouveau CSC, inauguré en 2013 , outil sans lequel toutes ces évolutions n’auraient pas été possibles. Une aventure en soi, tant le projet et le chantier – le bâtiment a été érigé autour des préfabriqués d’origine – ont été longs et compliqués. Sorti de terre après deux ans et demi de travaux, avec ses 3 000 m² ultra-fonctionnels sur trois niveaux, le bâtiment est aujourd’hui régulièrement cité en exemple . Une réussite.

En 20 ans de direction, quelques grains de sable se sont aussi glissés dans les rouages. Le feuilleton à rebondissements de la reprise par l’ARES de la Maison de quartier du Ziegelwasser (MQZ) au Neuhof, en 2012, en est un. Six mois après avoir remporté l’appel à projets, l’ARES jetait l’éponge, « la sécurité de l’équipe n’étant plus assurée. Si on était resté, on allait droit au drame », estime-t-il. Autre tentative avortée : la création, en 2007, du groupement d’employeur pérenne, à l’initiative de l’Albatros, l’Escale et l’ARES, qui avait vocation à mutualiser les embauches entre centres socioculturels. Là non plus, la greffe n’a pas pris.

Un avenir en politique ?

Au moment de tourner la page, Marc Philibert préfère voir le verre à moitié plein : l’accueil du handicap, « pensé dès la construction du bâtiment » ; les ateliers théâtre ; l’école de musique ; « le rayonnement de la structure sur toute l’Eurométropole, sans perdre de vue l’intérêt du quartier ». La Ruche 35, où bourdonnent plusieurs associations, dont Viva Spach , et la récente installation de l’ARES dans les anciens locaux libérés par le centre médico-social, au cœur du quartier Vauban et de la cité Spach. « Et puis, je suis toujours ému quand je vois des gamins qui s’éclatent… Être payé pour ça, c’est quand même extraordinaire ! En 20 ans, il n’y a pas un jour où je sois venu travailler à reculons.  »

Quant à savoir ce qu’il fera du temps qui s’offre désormais à lui, en plus de se remettre au théâtre, de s’occuper de ses proches et de faire un peu de coaching et de conseil, tout est ouvert… N° 5 sur la liste d’Alain Fontanel (LaREM) au premier tour des municipales de 2020 , cet ancien du PS avait jeté l’éponge suite à la fusion avec Jean-Philippe Vetter. Mais il n’en a peut-être pas fini avec la politique… « J’avais 20 ans en 1981. Quand on est embarqué dans une vague comme celle-là, ça marque ! Je ne suis pas désabusé et crois toujours en l’importance de la politique ; c’est un levier fort ! » explique celui qui ne ferme aucune porte et est engagé à divers niveaux, notamment dans le domaine de l’économie sociale et solidaire. Seule certitude : il ne faudra pas compter sur lui pendant la Coupe du monde de rugby 2023. Ses billets pour les matches de l’équipe de France sont déjà réservés.

© Dernières Nouvelles d’Alsace, mercredi 30 juin 2021. – Tous droits de reproduction réservés