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DNA 25 février 2011 – Un quartier au peigne fin

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Isabelle, Yasmine et Joseph : une enquête de terrain enrichissante. Pour tout le monde.
(Photo DNA — Jean-Christophe Dorn)

Esplanade / L’ARES a lancé une enquête sur les plus de 60 ans

Jusqu’au 17 mars, Isabelle et Yasmine sillonnent l’Esplanade pour prendre le pouls des plus de 60 ans. Sur un échantillonnage de 400 réponses, l’enquête de l’association des résidents de l’Esplanade cherche à cibler les besoins relationnels des personnes âgées et à répondre à leur isolement.

Elles vont vite devenir vos meilleures amies. Depuis le 17 janvier, Isabelle et Yasmine font du porte-à-porte. Pour la bonne cause, puisque les deux enquêtrices de l’ARES (Association des résidents de l’Esplanade) sont à l’écoute des personnes de plus de 60 ans, afin d’évaluer leurs besoins relationnels et de mesurer les risques d’isolement.

« Besoin de ce lien social »
« Tous les quatre ans, nous établissons un diagnostic social qui laisse apparaître un vieillissement de la population du quartier, souligne Marc Philibert, le directeur de l’ARES. Or, si nous voulons proposer des modes d’intervention adaptés contre l’isolement des personnes âgées et leur faciliter l’accès aux activités culturelles, par exemple, il nous faut mieux cerner les besoins. »
Sous la houlette de Patrick Colin, maître de conférence en sociologie à l’Université de Strasbourg, mais aussi en collaboration avec le service » personnes âgées » de la Ville de Strasbourg et avec les organismes de gestion de retraites, l’ARES espère engranger 400 réponses.
Le questionnaire qui porte sur des critères sociodémographiques, sur le logement, la santé, l’environnement, le quotidien, la mobilité, l’accès aux activités servira de banque de données à l’association. Une première tendance devrait se dégager d’ici l’été et une analyse plus fine des actions à mener pourrait être publiée à l’automne.
Jusqu’au 17 mars, les deux enquêtrices mandatées par l’ARES se rendent donc au domicile des plus de 60 ans. « Sur un plan personnel, c’est une expérience humaine très enrichissante, On apprend également beaucoup au contact de ces personnes, dont la plupart ont besoin de ce lien social », soulignent Isabelle et Yasmine qui ont déjà réalisé des enquêtes de terrain dans les domaines du social, du logement, de l’éducation ou des populations fragiles.
Isabelle Hégy prépare notamment un master de sociologie en « intervention sociale, conflits et développement », tandis que Yasmine Delcroix est détentrice d’un master en « développement social urbain et action publique ». Hier, les deux enquêtrices ont été accueillies chez Joseph, un retraité de 73 ans, qui réside rue de Copenhague. Autour d’un café, l’échange est convivial, souriant. « J’ai emménagé le premier dans l’immeuble en 1974 et j’ai vieilli avec le quartier », souligne cet ancien cadre des Telecom, l’une des mémoires de l’Esplanade.
Amateur de randonnées, amoureux de « la nature, des oiseaux et des ruisseaux », volleyeur pendant 25 ans à la Vogesia, le septuagénaire qui nage une fois par semaine est également un passionné de littérature allemande.

«Il nous suffisait de traverser la rue»
Mais un double séjour à l’hôpital pour une occlusion intestinale suivie de complications ont bouleversé son quotidien. « Heureusement, j’ai pu compter sur le soutien physique et moral de mes trois enfants et d’un réseau d’amis, y compris les voisins de palier, qui me faisaient les courses et même à manger. Mais sans cela, j’aurais pu basculer dans l’isolement. »
« J’ai vécu tous les changements depuis près de quarante ans. Après, tout dé pend de la perception de chacun. Aujourd’hui, le côté pratique tram + vélo qui rend le centre-ville plus proche me convient parfaitement. En revanche, je trouve que le centre commercial a perdu de son standing. Il est un peu dégradé. Au départ, c’était un lieu de commerce unique à Strasbourg avec un grand Prisunic, où on trouvait de tout. S’il nous manquait de la colle pour fixer les planches du placard, il nous suffisait de traverser la rue… »
Aujourd’hui, Joseph a repris du poil de la bête. « J’étais plutôt campagne et ma femme citadine. Mais aujourd’hui, je ne pourrais plus quitter l’Esplanade. Je vais au théâtre, au cinéma et la facilité d’accès au centre-ville a quand même des avantages que je ne voulais peut-être pas voir au début, relève-t-il.

«J’ai la nostalgie des belles boutiques de la rue de Rome»
Mais j’ai la nostalgie des belles boutiques de la rue de Rome. Il n’y a plus rien aujourd’hui. Les riverains s’en plaignent, car la plupart des commerces de proximité ont disparu : la maroquinerie, l’agence de voyage, les magasins de chaussures ou de vêtements. »

Des activités ouvertes mais sans contrainte horaire
Pendant l’entretien, Isabelle et Yasmine ont rempli le questionnaire, mais également listé les idées, les suggestions des personnes sondées sur un journal de terrain. « Par rapport à l’objectif de 400 réponses, il nous reste un peu plus de la moitié à collecter », estiment les deux jeunes femmes très complémentaires et déjà complices dans leur travail.
« Chaque rencontre est souvent une leçon de vie. Mais une tendance se dégage nettement chez les plus de 60 ans. C’est la mise en place d’activités ouvertes et surtout sans contrainte horaire », soulignent Isabelle et Yasmine qui poursuivent leurs investigations jusqu’au 17 mars.

Patrick Schwertz

Si vous souhaitez donner votre avis, si vous avez plus de 60 ans, si vous habitez à l’Esplanade, contactez l’ARES : ?03 88 61 63 82 et laissez vos coordonnées à Isabelle et Yasmine, les enquêtrices

© Dernières Nouvelles d’Alsace, Vendredi 25 février 2011. – Tous droits de reproduction réservés